Les herbivores sauvages sont bien dotés par la nature sur le plan musculaire, puisque la fuite est pratiquement leur seule arme contre les prédateurs. C’est donc le cas du cheval. Mais le muscle n’a pas pour seule fonction de permettre le déplacement. En effet, il assure aussi la stabilité du corps dans sa lutte contre la gravité et fabrique de la chaleur indispensable à la thermorégulation. Je vous explique dans cet article comment la mécanique articulaire se met en place chez le cheval !
Le plus souvent le mot « muscle » évoque un fuseau rouge qui mobilise les os entre eux, mais le cœur et les muscles lisses (blancs), qui permettent les mouvements péristaltiques de l’intestin ou la tonicité des vaisseaux sanguins, font partie de la même famille.
Les muscles squelettiques (c’est-à-dire liés au squelette) sont composés de fibres musculaires striées de bandes claires et foncées qui réagissent à des excitations du système nerveux volontaire. Chaque fibre mesure de 1/100e à 1/1000e de millimètre de diamètre, pour 1mm à 30cm de long. Ces fibres sont des cellules spécialisées qui permettent au muscle de se rétracter. Pour vivre et fonctionner, elles sont irriguées par des vaisseaux sanguins qui les approvisionnent en oxygène et glucose, qui les débarrassent de leur « déchets de combustion », CO² et acide lactique.
Elles sont innervées par des nerfs qui conduisent l’influx pour commander leur contraction ou renvoyer des informations au système nerveux central (la douleur par exemple).
Pour s’attacher aux os, les muscles sont terminés par des tendons. Ceux-ci sont des structures fibreuses constituées essentiellement de protéines (collagène).
Les fibres musculaires peuvent être divisées en deux types :
Les fibres lentes, encore appelées de type I, dont le métabolisme est aérobie (utilise l’oxygène). Le réseau sanguin capillaire qui les entoure peut atteindre 200km pour 100g de muscle. Elles sont peu fatigables. Elles utilisent comme « combustibles » les lipides et les glucides.
Les fibres rapides, encore appelées de type II, dont le métabolisme est mixte ou uniquement anaérobie (il n’utilise pas l’oxygène). Elles sont riches en glycogène et très fatigables. Pour fonctionner, elles fabriquent de l’ATP. Cette réserve n’assure que deux à trois secondes d’activité et c’est en puisant dans la ressource de créatine phosphate que la cellule musculaire rapide anaérobie peut poursuivre son activité jusqu’à une quinzaine de secondes. Il lui faudra ensuite trente seconde pour reconstruire 70% de ses réserves et quatre à cinq minutes pour « faire le plein ». Le rendement de cette activité est faible : 40% environ, c’est-à-dire 60% de l’énergie utilisée est transformée en chaleur.
La répartition de ces fibres varie selon les individus et selon l’entraînement, mais la prédominance d’un type de fibres n’a pas d’influence sur la performance, car c’est l’interaction optimale des fibres entre elles qui est importante.
En pratique, un entraîneur doit attacher une attention particulière à la récupération pour juger la capacité d’effort d’un cheval, mais aussi pour permettre à l’organisme de s’adapter à l’effort exigé.
Mécanique articulaire : comment l’entretenir ?
Outre les coups de sang ou les traumatismes que j’ai déjà évoqué dans d’autres articles, certaines boiteries peuvent résulter de traumatismes musculaires plus discrets. C’est le cas bien connu de la myopathie fibrosante (du muscle semitendineux le plus souvent), qui survient en général à la suite d’une prise de longe, d’un traumatisme pendant le transport ou pendant l’exercice (chez le quarter horse).
La démarche est caractéristique : pendant la phase levée, le cheval tire son pied vers l’arrière d’une dizaine de centimètres avant de poser le pied en pince. La palpation met en évidence une induration du muscle. Le traitement ne peut être que chirurgical, mais il donne de bons résultats.
Dans un monde où tout doit aller vite, le cheval se trouve de plus en plus souvent confronté au syndrome de surentraînement. Le niveau exigé pour les jeunes chevaux est toujours plus élevé, les épreuves plus rapprochées et une gestion parfois hasardeuse des phases de récupération empêchent le muscle de s’adapter à l’effort.
Les signes sont discrets, mais doivent éveiller l’attention : irritabilité inhabituelle et perte de poids sans explication se manifestent plusieurs semaines avant la baisse de performance. Si l’entraînement n’est pas modifié à ce stade, il faudra accorder plusieurs semaines ou plusieurs mois de repos au cheval avant de lui voir retrouver son niveau de performance optimal.
Si les mécanismes intimes d’action des électrolytes, des vitamines, des oligo-éléments et des acides aminés sur le fonctionnement musculaire sont relativement bien connus, leur efficacité en administration orale peine à être prouvée. Il n’en demeure pas moins qu’une complémentation semble indispensable au cheval de compétition. En revanche, il est certain que la qualité de l’aliment est primordiale pour une contraction musculaire performante et soutenue.
Le muscle est un organe délicat et les pathologies spectaculaires ne doivent pas occulter les difficultés quotidiennes du système musculaire qui brident les chevaux dans leurs performances et ralentissent leur progression.
C’est par une subtile alchimie de travail, de récupération, d’alimentation et de complémentation, que le cavalier peut apporter chaque jour les éléments indispensables à un fonctionnement harmonieux du muscle et prévenir les incidents parfois lourds de conséquences.
Anaël MARZIN
Responsable marché Equideos