J’ai rencontré, récemment, un éleveur qui m’a fait part des problématiques qu’il rencontrait chez les jeunes poulains victimes de diarrhées (retard de croissance ou pire mortalité et coûts de traitement importants). En faisant quelques recherches, je me suis aperçue que 80% des poulains connaissent au moins un épisode de diarrhée entre 0 et 6 : une bonne raison de mener quelques recherches sur ce phénomène !
Première constatation : quelles que soit son origine, la diarrhée doit être diagnostiquée et traitée rapidement, car la déshydratation peut provoquer rapidement la mort du poulain.
La diarrhée a des origines très variées
- La diarrhée de « chaleur de lait »
La diarrhée de « chaleur de lait » est fréquente chez le poulain âgé de 5 à 14 jours. Elle est transitoire et le poulain conserve un bon état général. J’ai longtemps pensé que ces diarrhées étaient liées à des modifications de la composition du lait, en relation avec les changements hormonaux liés au retour en chaleur de la jument. Cependant, suite à mes recherches, rien ne vient étayer cette hypothèse car les poulains nourris artificiellement présentent également cet épisode diarrhéique. Il semblerait donc, plutôt, que les modifications de la flore digestive du gros colon, liées à l’ingestion d’aliments solides (y compris les crottins !) qui commence à cet âge, soient responsables de la diarrhée de chaleur de lait.
- Les diarrhées d’origine infectieuse
Origine bactérienne :
Salmonella Typhimurium est responsable d’une diarrhée sévère et souvent fatale. Une septicémie y est souvent associée, responsable de nombreuses complications (uvéite, arthrite septique, méningite, pneumonie, …).
Escherichia coli est plus souvent responsable d’une septicémie que d’une diarrhée dont le pronostic est généralement bon.
Clostridium perfringens type A, B et C et Clostridium difficile sont responsables de diarrhées nécrosantes et hémorragiques, le plus souvent fatales. Ces trois bactéries se rencontrent surtout chez le poulain âgé de 0 à 15 jours. Chez le poulain plus âgé, les principaux responsables de diarrhée sont plutôt Rhodococcus equi et Lawsonia intracellularis.
Origine virale :
Les rotavirus sont responsables de plus de 50% des diarrhées chez le poulain. Ces diarrhées sont très contagieuses mais rarement mortelles.
Origine parasitaire:
Le parasite le plus fréquent chez le poulain est strongyloïdes westeri. Les poulains infestés présentent une diarrhée entre l’âge de 8 à 12 jours. Les poulains plus grands (à partir de 15 jours) peuvent être infestés par des grands ou des petits strongles, ou des ascaris.
La contamination par des bactéries ou des virus se fait par voie oro-nasale, à partir des crottins des chevaux adultes porteurs sains et des poulains infectés. Certaines bactéries, telles que les clostridium, sont largement répandues dans l’environnement. Strongyloïdes westeri est transmis par voie intra-mammaire.
Les examens complémentaires
Toute diarrhée, surtout chez un poulain de moins de 15 jours, nécessite l’intervention du vétérinaire pour établir un diagnostic précis et mettre en place le traitement.
L’examen clinique du poulain permet d’évaluer sont état général, la présence d’une maladie primaire et/ou l’apparition de complications. L’appareil digestif fait naturellement l’objet d’une attention toute particulière : auscultation abdominale, palpation et recherche d’une distension abdominale. L’examen de la diarrhée permet de relever quelques éléments importants de diagnostic.
Il est important de rechercher et de quantifier les signes de déshydratation : muqueuse sèches, persistance du pli de peau, œil foncé. Le degré de déshydratation détermine les volumes de perfusion à apporter.
Des examens complémentaires sont souvent nécessaires : le prélèvement des fèces est le plus couramment pratiqué. L’échantillon est récolté au niveau du rectum. L’examen direct permet la mise en évidence de certaines bactéries ou protozoaires, mais également de parasites. Une mise en culture et un antibiogramme sont généralement demandés. L’analyse de sang est indispensable pour évaluer l’état général du poulain et connaître son statut immunitaire.
Réhydrater le poulain
Si la diarrhée persiste plus de quelques jours, ou si le poulain présente une dégradation de son état général, un traitement doit être rapidement mis en place. La « thérapie liquidienne » est indispensable. Les diarrhées entraînent des pertes hydriques et des déséquilibres électrolytiques (perte en sodium, potassium et bicarbonate) qu’il faut compenser.
Le choix du liquide de réhydratation repose sur l’analyse sanguine. La réhydratation par voie intraveineuse est la plus simple et la plus rapide à réaliser, mais il est également possible de réhydrater le poulain par voie orale.
La réhydratation s’accompagne de l’administration d’autres principes actifs. Les pansements gastriques (kaolin, pectate ou charbon activé) protègent la muqueuse intestinale et absorbent les endotoxines. Ils s’administrent pas sondage naso-gastrique pour obtenir des quantités suffisantes. On les associe à des probiotiques qui favorise le développement de la flore intestinale.
Les antibiotiques, bien que quelquefois mis en cause dans l’apparition des diarrhées, préviennent les risques surinfection et de septicémie.
Les anti-spasmodiques sont indiqués si le poulain présente des signes de colique.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens doivent être utilisés avec parcimonie car ils possèdent de réels effets ulcérogènes et néphrotoxiques.
Chez le poulain plus âgé, une vermifugation peut être envisagée, à demi-dose si le poulain n’a jamais été vermifugé, pour éviter une occlusion intestinale en cas d’infestation massive par des parascaris.
L’administration de plasma, indiquée en cas de défaut de transfert d’immunité ou de pertes protéiques importantes, n’est pas possible en France car ces produits ne sont pas disponibles et leur importation est interdite.
Des mesures de prévention efficaces
- L’entretien régulier des boxes et des pâtures (désinfection, ramassage des crottins, …) permet de diminuer la charge microbienne et parasitaire.
- Il est portant de respecter les calendriers de vermifugation et de vaccination des poulinières.
- Si l’effectif est important, il est préférable de regrouper les chevaux par tranche d’âge et d’éviter ainsi les contacts entre les poulains et les autres chevaux.
- Le poulain malade et sa mère sont isolés pour prévenir tout risque de contagion. La séparation sera maintenue deux semaines après la disparition des symptômes pour éviter toute dissémination par des crottins contaminés. Le personnel au contact du ou des malade(s) respecte les mesures d’hygiène élémentaires (blouses, gants, sur-bottes ou pédiluve).
Enfin, pour clôturer mes recherches, il est important de notifier que dans la grande majorité des cas, le pronostic des diarrhées est bon si un traitement adéquat est mis en place rapidement.
Anaël MARZIN
Responsable marché Equideos